Voilà une question qui nous introduit radicalement dans le monde des tabous. S’il est vrai que le métier ne s’enseigne pas dans les universités et que nul parmi ceux qui l’exerce n’a le courage de l’afficher sur son CV, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une activité exercée par certaines personnes à des fins de subsistance. Cette activité, qui dans 80% des cas est exercée par des femmes nourrit son homme ou plutôt, nourrit sa femme. Mais la réalité c’est qu’elle constitue un fléau et l’expression d’un véritable malaise social.
Une roue de secours
Activité par laquelle une personne appelée « prostitué » offre des services sexuels à une autre de sexe opposé (client) en contrepartie d’une somme d’argent, la prostitution est considérée comme le métier le plus vieux au monde. Conséquence du chômage, elle est devenue une échappatoire pour la gent féminine en situation notamment celle en situation difficile sur le plan financier. Beaucoup de jeunes filles approchées par notre rédaction témoignent qu’il s’agit d’un mal nécessaire. Bella (nom d’emprunt) reconnaît qu’elle n’a pas d’autre choix aujourd’hui: « j’ai arrêté mes études au CE1, nous étions au village et je plaisais plutôt aux hommes. J’avais confiance en un homme mais finalement il m’a laissé tomber et ainsi de suite… On grandit vite. Le monsieur à qui j’ai fait un enfant ne s’occupe pas de nous et nous a finalement abandonné ».
C’est donc ainsi, témoigne celle qui a aujourd’hui 23 ans à peine, qu’elle s’est mise à faire cette activité afin de subvenir à ses besoins. Princesse de son côté arpente l’une des ruelles sombre d’un quartier périphérique dans le nord-est de la ville de Lomé. « Je ne le fais pas tous le temps, juste 2 ou 3 fois par semaines afin de joindre les deux bouts. Si je trouve quelqu’un pour m’aider à apprendre un autre métier, je ne le ferai plus. ».La prostitution se révèle pour une importante frange de celles qui la pratiquent comme une échappatoire à la galère. Mais pour certaines aussi elle constitue l’ultime recours parce qu’ayant résisté à toutes formes d’éducation et de discipline. Voilà d’ailleurs pourquoi celles qui assument publiquement cette activité sont assez rares.
La complicité des gouvernants
Pour le journaliste Godfrey Akpa, « vouloir lutter contre la prostitution, est comme combattre des moulins à vent, donc impossible ». L’homme des médias, précise d’ailleurs « il y a à Lomé des hôtels de luxe qui encouragent la prostitution en employant des jeunes filles expertes en les matières… » La situation est le plus souvent la même dans tous les pays de la planète et c’est au su et au vu des autorités. Celles-ci font d’ailleurs souvent partie, soit du business lui-même en tant que clients, ou encore en sont la principale cause en raison de la mauvaise gouvernance et de leur silence coupable face à la multiplication des bordels.
Il est vrai, l’activité n’est généralement pas reconnue dans le dispositif juridique comme un métier. Entre autres raisons, le fait qu’elle soit considérée comme une activité exercée sous la contrainte. Comme s’exclamera Maud Olivier, « Où est la liberté d’exercer avec 15 à 20 pénétrations par jour sans désir ? ».
La prostitution ne constitue donc pas en soi une infraction, mais toute organisation de la profession se heurte aux dispositions du code pénal condamnant le proxénétisme. C’est d’ailleurs pour cela, que les textes de lois seront rares à punir celui ou celle qui se prostitue en la présentant plutôt comme une victime. Ironie. Un autre phénomène est celui qu’on constate dans les pays musulmans. Plutôt connu et considéré comme assez regardant sur les questions liées à la pudeur et aux mœurs, ceux-ci ne semblent pas du reste. Selon différents rapports du département américain sur la traite des êtres humains dans les années 2010, aucun Etat arabe ne paraît dans la rubrique des bons élèves. Au contraire, la situation est très critique dans des pays l’Algérie, le Koweït, le Soudan, l’Arabie Saoudite, la Syrie, le Yémen et la Libye. En Arabie Saoudite par exemple, des réseaux bien organisés, kidnappent les femmes en Asie et en Afrique surtout et les livrent dans le pays en tant que domestiques.
C’est la voie pour la prostitution puisque celles-ci, lorsqu’elles arrivent à fuir les conditions inhumaines qu’elles vivent auprès de leurs maîtres n’ont pas d’autres choix, explique le site d’information Lakome.
Il est donc clair que derrière la question de la prostitution se dissimulent un système d’exploitation de femmes, de filles et d’enfants qu’avec un peu de volonté et d’honnêteté, les gouvernants auraient pu combattre.
Même si comme, Zeus WOUKINTA, doctorant à la faculté de Droit de l’UL, on peut douter de l’aboutissement totale de la lutte contre ce fléau, on peut admettre avec ce dernier que la création d’emplois, les sensibilisations ainsi que la mise en œuvre de mesures dissuasives pourraient aider certaines personnes, même en extrême nécessité à y renoncer et donc à réduire un tant soit peu, le phénomène.
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